Laye est née de l’union de deux dragons, tous deux neutres, vivants en solitaire sur la Terre qu’ils avaient choisis. Elle avait à ses côtés une sœur, Eleknah, et un grand frère, Pokah. Très vite, Laye se détacha de sa fratrie par son caractère étrange et atypique. Toujours joyeuse, mais aussi pataude et maladroite, elle n’était pas ce qu’on pouvait appeler « la fille de son père », qui lui, était un guerrier né et aguerri de surcroît. Personne ne comprenait les absences à répétitions de leur fille qui semblait vivre un peu dans « son petit monde ». Et dire que ses parents, eux, n’étaient pas ce qu’on pouvait appeler des enfants de cœur… Et qu’ils espéraient que leurs enfants suivent leurs traces… Mais jusqu’à son adolescence, cela ne posait pas de réel problème. Les parents se décidèrent alors à attendre cette période pour remettre les yeux en face des trous à leur fille, qui, dans ce monde teinté de conflit, faisait un peu tache. Mais qu’à cela ne tienne, Laye pourrait continuer à vivre dans sa micro réalité le temps de son enfance. Tout du moins, c’est ce qui était prévu à la base.

Un jour, son frère, agacé par la douceur ambiante du cocon familial, défia son père, décrétant qu’il était temps pour Laye de s’endurcir, pour le bien général. Le père refusa d’affronter son fils, et décida de le bannir de leur petit groupe. Enfin, c’était encore une fois, ce qui aurait dû se passer…

Pokah se jeta sur son père, et se battit avec lui dans un combat à mort. Le père étant un puissant combattant, il n’eut aucun mal à blesser son fils, mais n’avait pas le cœur de le tuer. Quelle erreur. Son fils, lui, enfermé dans son orgueil et dans sa rage de vaincre, tua son géniteur sous les yeux de la petite Laye et sa famille.

Mais, croyez-vous réellement que le dragon allait s’arrêter ici ? Non, il jugea que le meilleur chemin à prendre était de prendre la tête de leur groupe, que cela plaise à sa mère, ou non. Celle-ci, autrefois très soumise à son époux, renonça à essayer de raisonner son fils, elle resta au sein de ce petit « clan » tandis que la petite Eleknah prit Laye pour responsable des actes de son fraternel.

Laye devint donc le souffre-douleur de sa sœur jumelle, ainsi que celle de son frère aîné. Battue, maltraitée, humiliée, Laye sombra peu à peu dans une folie plus qu’inadaptée pour une petite de son âge ainsi que dans une sorte de déni de la réalité. Elle en oublia que son père avait été tué.

A son adolescence, elle apprit que sa mère avait en réalité adopté sa sœur, et son frère voulut donc bannir l’enfant du petit groupe, ignorant les supplications de la mère adoptive. Cet évènement se solda par l’exil de la mère ainsi que de la petite Eleknah.  

Est-ce que Laye était satisfaite de l’exil de son bourreau ? Pas le moins du monde, on pouvait presque dire qu’elle lui manquait. Dans sa folie, sa sœur était devenue une entité à part entière, elle espérait secrètement qu’elle revienne et la sauve de la haine de son frère, qui elle, était plus que disproportionnée.  

Son frère, bien que d’un naturel dur et froid, portait un intérêt tout particulier à sa sœur, et entreprit de l’entraîner, afin de faire d’elle une véritable guerrière. L’adolescente n’était, certes, pas très emballée, mais pas suicidaire, de ce fait, elle obéit et devint l’apprentie de l’assassin de son père.
Il la forgea alors dans la douleur et le sang, lui apprenant l’amour de la souffrance et la frénésie meurtrière. Il lui apprit à se servir de son pouvoir, et de ses griffes, comme un véritable père, s'il on oubliait le véritable contexte.

Cela, jusqu’à l’âge adulte, où, satisfait de son travail et de plus en plus atteint par la folie, il se décida à la libérer, lui laissant le choix de partir ou de rester avec lui. Il décréta qu’il avait entendu la voie du Seigneur et qu’il lui avait conté qu’elle était prête. Laye lui expliqua qu’elle le remerciait pour tout ce qu’il avait fait pour elle, mais qu’elle préférait vivre sa propre vie. Ce fut sa première expérience du mensonge. Cela, jusqu’à ce que, pour la première fois de sa vie, elle soit prise d’un éclair de lucidité. Et d’un flash… Qui lui rappela l’intégralité de son existence. Tout, du début à la fin. Il avait tué son père… Exilé sa famille. Il avait brisé sa vie… Lui, son mentor et frère. Sa colère était grande… Trop grande. Et la tentation, insoutenable. Et la mort... Imminente. Elle assassina son propre frère et s'évanouit, perdant ainsi la mémoire.

Depuis, Laye vit seule, son esprit est apaisé et elle tente petit à petit de se remettre de l'intégralité de ses traumatismes, cependant, tout cela lui aura au moins apprit quelque chose.

Rien n'est vrai. Tout est permis.

C'est dans cette optique que Laye a continuée sa vie, titubant sans savoir pourquoi, vivant sans trop savoir comment, et par-dessus tout, errant telle une morte vivante. Désormais, elle ne vit que pour son confort personnel et cela, c'est une affaire entendue.